Etretat et l'aiguille creuse

Naguère modeste village de pêcheurs, Étretat devint une station balnéaire de renom. Elle se trouve au nord du Havre sur le littoral de la Manche en pays de Caux. L'aspect extraordinaire et monumental de ses falaises de craie blanche presque immaculée et ses plages de galets grisâtres en ont fait un des lieux incontournables du tourisme international. Des peintres comme Courbet, Bourdin ou Monet ont beaucoup contribué à sa publicité, en en immortalisant la spécificité. Des écrivains comme Flaubert et Maupassant ont été des fidèles du lieu tandis que Maurice Leblanc, dans une aventure d'Arsène Lupin intitulée l'Aiguille Creuse, contribua au mythe entourant le site.

Les falaises d'Étretat, hautes de 75 m côté aval et 84m côté amont, sont constituées de calcaire. On y distingue les strates régulières de silex, ce qui explique la présence de galets sur la plage. En effet, suite à l'effondrement de pans de falaise, le calcaire et le silex se trouvent au contact de l'eau de mer qui dissout le calcaire et l'action des vagues polit le silex pour en faire des galets.
Au pied des falaises, les éboulis proviennent de la chute de pans entiers de roche. En effet, l'eau de pluie s'infiltre dans la craie poreuse et l'action du gel peut alors s'ajouter à ce phénomène destructeur. Comparativement, l'action de la mer est moindre, bien que sa responsabilité soit également établie dans le processus de destruction des falaises, car elle en érode la base en pratiquant des encoches de sapement. Autrement dit, « les agents d'érosion les plus actifs sont davantage continentaux que marins.

L'existence de trois arches successives: la porte d'Amont, la porte d'Aval et la Manneporte n'est pas liée à l'origine à l'érosion marine, mais à l'action d'une rivière côtière parallèle à la plage qui a creusé son lit dans la falaise avant le recul de celle-ci, matérialisé par l'« aiguille » d'un calcaire plus dur qui a empêché sa dissolution définitive, d'où cette extraordinaire création de la nature. Ensuite, la mer a élargi les arches, donnant au site l'aspect qu'on lui connait aujourd'hui.

L'activité humaine remonte à l'antiquité, et a toujours dû être liée à la pêche, avant le développement du village en tant que station balnéaire au XIXe siècle et la disparition des pêcheurs à la fin du XXe siècle. Peu à peu, l'activité traditionnelle de la pêche fut supplantée par le tourisme. Étretat ne succomba à la mode des bains de mer qu'après 1843. C'est à cette époque que l'on construisit la route de Fécamp et la route du Havre. Une ligne de train et une gare en 1890 achevèrent de désenclaver ce lieu de villégiature déjà reconnu. C'est à cette époque que l'on commença à bâtir des villas en style balnéaire, à un rythme de plus en plus soutenu, alors que ce n'était guère le cas avant 1830. Une grande partie de l'intelligensia parisienne, des écrivains, artistes et hommes politiques fréquentait Etretat l'été.

La 2e guerre mondiale mit un frein à cette croissance du tourisme. Le front de mer fut mutilé par l'occupant allemand, qui alla jusqu'à détruire le casino et les villas pour améliorer la défense du site en cas de débarquement allié. Après la guerre, la façade maritime fit l'objet d'une reconstruction contestable.
À son époque déjà, le site attirait de nombreux touristes parmi lesquels des « lupinophiles », admirateurs d'Arsène Lupin : des étudiants américains venus chercher la clé de la grotte, où le « gentleman cambrioleur » avait retrouvé le trésor des rois de France. Le film Arsène Lupin, sorti en 2004, offre de nombreuses vues sur la falaise et l'Aiguille.